La série Au champ
 
Comme dans le souvenir présenté en introduction, les sorties pour la série Au champ avaient toutes quelque chose d'une chasse au trésor. Avant d'arriver sur site, il fallait chercher, se faufiler, emprunter des chemins improbables pour déboucher dans ces ilôts étonnants. Malgré la proximité fréquente de routes, de voies de trains ou tramways, les jardins familiaux nous enferment dans un calme connecté à la terre, à des sentiments simples, primaires. Même en pleine ville, ils ressourcent.
Les jardins d'aujourd'hui sont quasiment tous délimités, voire cloturés, certains même barricadés. A chaque rencontre, il faut d'ailleurs montrer patte blanche, expliquer les raisons de notre venue. Beaucoup de jardiniers se plaignent de dégradations. Je m'étonne que personne ne se plaigne de vols, uniquement de dégradations. On ne vole pas les courgettes. Certaines communes où les dégradations se calment tentent de décloisonner les jardins, notamment pour qu'ils profitent aussi aux habitants et passants du quartier, même s'ils ne jardinent pas.
Les communautés de jardiners sont toujours encadrées. Une association ou la commune annonce les règles. Il n'est pas rare de trouver à l'ombre d'un arbre ou d'un cabanon, table et chaises pour se poser, se reposer. Les règlements laissent plus ou moins place à la vie au vert, en plus du jardinage. Les barbecues, piscines, jeux sont très souvent explicitement interdits. Il faut dire que les confinements successifs et la précarité ont rendu tentant le fait de s'y amménager un petit espace de vie au vert. Cela reste interdit. Ces potagers sont fait pour nourrir.
Les places dans les jardins familiaux sont rares. Il faut attendre des mois, souvent des années, pour en obtenir contre quelques dizaines ou une centaine d'euros à l'année. Du fait de cette rareté, les jardiniers qui ne travaillent pas leur terre se voient exclus. Après les jardins familiaux dérivant des jardins ouvriers d'antan, la tendance aujourd'hui est à développer, surtout en zone urbaine, les jardins partagés (cultivés collectivement) et les jardins nourriciers (entretenus par les communes au profit des cantines et habitants). Alors que l'artificialisation des sols est de plus en plus limitée, alors que le réchaufement climatique plaide en faveur des espaces verts, l'avenir de ces jardins résistera-t-il à la pression de l'urbanisation ? Comme le montre l'exemple d'Aubervilliers, ce ne sera en tout cas pas sans la lutte des jardiniers.
 
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