
… si vous me ramenez mon Aurélie… alors, vous aurez un vrai boulanger. Je vous ferai du pain comme vous en aurez jamais vu. Je pétrirai chaque fournée une demi-heure de plus, et dans les fagots pour chauffer le four, je mélangerai du romarin. Et pendant qu’il cuira, je ne dormirai pas comme on fait d’habitude, mais j’ouvrirai la porte toutes les cinq minutes, pour ne pas le perdre des yeux. Je vous ferai un pain si bon que ce ne sera plus un accompagnement pour autre chose ; ce sera une nourriture pour les gourmands… il ne faudra plus dire : « J’ai mangé une tartine de fromage sur du pain. » On dira : « J’ai dégusté une tartine de pain sous du fromage. » et chaque jour, en plus de ma fournée, je pétrirai cinq kilos pour les pauvres… Et dans chaque miche que je vous ferai, il y aura une grande amitié et un grand merci.
Marcel Pagnol, La femme du boulanger